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==Le pouvoir central dans l'Etat Féodal Primitif== | ==Le pouvoir central dans l'Etat Féodal Primitif== | ||
Le patriarche de la tribu pastorale, malgré tout le prestige que lui valent ses fonctions de général et de grand-prêtre, ne possède néanmoins aucun pouvoir despotique, et le roi des petites peuplades devenues sédentaires n'a en général qu'une autorité des plus restreintes. Par contre la première agglomération en une imposante armée de fortes tribus pastorales se produit généralement sous l'impulsion d'un génie militaire et dans des formes | Le patriarche de la tribu pastorale, malgré tout le prestige que lui valent ses fonctions de général et de grand-prêtre, ne possède néanmoins aucun pouvoir despotique, et le roi des petites peuplades devenues sédentaires n'a en général qu'une autorité des plus restreintes. Par contre la première agglomération en une imposante armée de fortes tribus pastorales se produit généralement sous l'impulsion d'un génie militaire et dans des formes despotiques{{ref|3}}. En temps de guerre la phrase d'Homère « la règle de la majorité n'est pas une bonne chose, au-dessus du grand nombre il devrait y avoir un roi » est une vérité éprouvée et reconnue par les peuples les plus réfractaires à toute idée d'autorité. Sur le sentier de la guerre le libre chasseur primitif obéit sans réserve au chef qu'il a élu ; les cosaques de l'Ukraine, si jaloux de leur indépendance en temps de paix, accordaient à leur ''hetman'' pendant la guerre pleins pouvoirs de vie et de mort. Cette soumission au général est un trait commun à toute psychologie de guerriers véritables. | ||
De même que l'on trouve à la tête des grandes expéditions de nomades des despotes tout puissants, un Attila, un Omar, un Gengis-Khan, un Tamerlan, un Mosilikatse, un Ketchouéyo, de même l'existence d'un fort pouvoir central semble être la règle tout d'abord dans les grands Etats formés par la fusion belliqueuse de plusieurs Etats Féodaux Primitifs. Citons au hasard Sargon, Cyrus, Clovis, Charlemagne, Boleslaw le rouge. Parfois, surtout tant que l'Etat n'a pas atteint ses limites géographiques ou sociologiques, ce pouvoir peut se maintenir intact entre les mains de quelques monarques énergiques dont l'autorité dégénère alors facilement en une « césaromanie », allant jusqu'au plus insensé des despotismes. La Mésopotamie et l'Afrique en particulier nous offrent des exemples caractéristiques de ces derniers cas. Nous ne pouvons nous étendre ici sur les formes de gouvernement de ces Etats, formes qui n'ont eu d'ailleurs qu'une influence insignifiante sur la marche générale des événements. Contentons-nous de constater que le développement de la forme despotique du gouvernement résulte avant tout des deux faits suivants : Quelle position religieuse occupe le souverain en dehors de ses fonctions de général ? Possède-t-il ou non le monopole du commerce ? | De même que l'on trouve à la tête des grandes expéditions de nomades des despotes tout puissants, un Attila, un Omar, un Gengis-Khan, un Tamerlan, un Mosilikatse, un Ketchouéyo, de même l'existence d'un fort pouvoir central semble être la règle tout d'abord dans les grands Etats formés par la fusion belliqueuse de plusieurs Etats Féodaux Primitifs. Citons au hasard Sargon, Cyrus, Clovis, Charlemagne, Boleslaw le rouge. Parfois, surtout tant que l'Etat n'a pas atteint ses limites géographiques ou sociologiques, ce pouvoir peut se maintenir intact entre les mains de quelques monarques énergiques dont l'autorité dégénère alors facilement en une « césaromanie », allant jusqu'au plus insensé des despotismes. La Mésopotamie et l'Afrique en particulier nous offrent des exemples caractéristiques de ces derniers cas. Nous ne pouvons nous étendre ici sur les formes de gouvernement de ces Etats, formes qui n'ont eu d'ailleurs qu'une influence insignifiante sur la marche générale des événements. Contentons-nous de constater que le développement de la forme despotique du gouvernement résulte avant tout des deux faits suivants : Quelle position religieuse occupe le souverain en dehors de ses fonctions de général ? Possède-t-il ou non le monopole du commerce ? | ||
Le césarisme uni de la papauté tend partout à développer les formes les plus crasses du despotisme pendant que, par la séparation des pouvoirs spirituels et séculiers, leurs représentants respectifs se contiennent et se modèrent mutuellement. Nous trouvons une émonstration caractéristique de ce fait dans les conditions sociales des Etats Malais de l'Insulinde, véritables Etats Maritimes dont la fondation forme un pendant exact à celle des Etats Maritimes de la Grèce. Le prince y est en général tout aussi impuissant que l'était le roi aux temps reculés de l'histoire attique. Là, comme à Athènes, le pouvoir est exercé par les chefs de district (à Soulou les datto, à Atjeh les panglima). Par contre, partout où « comme à Toba le souverain pour des raisons religieuses occupe la position d'un petit pape, les choses changent de face. Les panglima dépendent alors entièrement du rajah dont ils ne sont que les fonctionnaires5. » Nous rappellerons encore ici le fait connu que les aristocraties d'Athènes et de Rome, après avoir aboli l'ancienne royauté, conférèrent néanmoins le titre de « roi » à un représentant du pouvoir, dénué de toute autorité effective : les dieux devaient continuer de recevoir leurs sacrifices selon l'usage. Pour la même raison le descendant des anciens rois de la tribu est souvent maintenu comme dignitaire purement représentatif longtemps après que le pouvoir proprement dit est passé aux mains d'un chef belliqueux. L'on trouve ainsi chez les derniers Mérovingiens le maire du palais carolingien à côté du roi fainéant de la race de Meroweg, comme au Japon le shogun à côté du Mikado et dans le royaume des Incas le généralissime aux côtés du Huillcauma dont le pouvoir est de plus en plus restreint aux fonctions sacerdotales6*. | Le césarisme uni de la papauté tend partout à développer les formes les plus crasses du despotisme pendant que, par la séparation des pouvoirs spirituels et séculiers, leurs représentants respectifs se contiennent et se modèrent mutuellement. Nous trouvons une émonstration caractéristique de ce fait dans les conditions sociales des Etats Malais de l'Insulinde, véritables Etats Maritimes dont la fondation forme un pendant exact à celle des Etats Maritimes de la Grèce. Le prince y est en général tout aussi impuissant que l'était le roi aux temps reculés de l'histoire attique. Là, comme à Athènes, le pouvoir est exercé par les chefs de district (à Soulou les datto, à Atjeh les panglima). Par contre, partout où « comme à Toba le souverain pour des raisons religieuses occupe la position d'un petit pape, les choses changent de face. Les panglima dépendent alors entièrement du rajah dont ils ne sont que les fonctionnaires5. » Nous rappellerons encore ici le fait connu que les aristocraties d'Athènes et de Rome, après avoir aboli l'ancienne royauté, conférèrent néanmoins le titre de « roi » à un représentant du pouvoir, dénué de toute autorité effective : les dieux devaient continuer de recevoir leurs sacrifices selon l'usage. Pour la même raison le descendant des anciens rois de la tribu est souvent maintenu comme dignitaire purement représentatif longtemps après que le pouvoir proprement dit est passé aux mains d'un chef belliqueux. L'on trouve ainsi chez les derniers Mérovingiens le maire du palais carolingien à côté du roi fainéant de la race de Meroweg, comme au Japon le shogun à côté du Mikado et dans le royaume des Incas le généralissime aux côtés du Huillcauma dont le pouvoir est de plus en plus restreint aux fonctions sacerdotales6*. | ||
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# {{note|1}}Ratzel, l, ch. 1, p. 263. | # {{note|1}}Ratzel, l, ch. 1, p. 263. | ||
# {{note|2}}Franz Oppenheimer, ''Grossgrunrfeigentum und soziale Frage'', II, 1, Berlin. | # {{note|2}}Franz Oppenheimer, ''Grossgrunrfeigentum und soziale Frage'', II, 1, Berlin. | ||
# {{note|3}} | # {{note|3}}« Ce qui caractérise l'organisation nomade c'est la lité avec laquelle elle développe, du fonds patriarcal, des puissances despotiques d'une ée considérable. » (Ratzel, 1, ch. II, p. -389). | ||
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