Différences entre les versions de « Max Stirner:III. L'unique »

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{{titre|L’Unique et sa propriété|[[Max Stirner]]<br><small>(1845)</small>|III. — L'Unique}}
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l'insensibilité à l'égard du réel, au « mépris du Monde », tandis que la seconde se
l'insensibilité à l'égard du réel, au « mépris du Monde », tandis que la seconde se
clora par le renversement de l'idéal et le « mépris de l'Esprit ».
clora par le renversement de l'idéal et le « mépris de l'Esprit ».
L'opposition du réel et de l'idéal est inconciliable, et l'un ne peut jamais devenir
L'opposition du réel et de l'idéal est inconciliable, et l'un ne peut jamais devenir
l'autre : si l'idéal devenait réel, il ne serait plus l'idéal, et si le réel devenait idéal, il
l'autre : si l'idéal devenait réel, il ne serait plus l'idéal, et si le réel devenait idéal, il
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sinon, idéal et réalité ne se recouvrent jamais. L'idée ne peut être réalisée et rester
sinon, idéal et réalité ne se recouvrent jamais. L'idée ne peut être réalisée et rester
idée, il faut qu'elle périsse comme idée ; et il en est de même du réel qui devient idéal.
idée, il faut qu'elle périsse comme idée ; et il en est de même du réel qui devient idéal.
Les Anciens nous représentent les partisans de l'idée, et les Modernes ceux de la
Les Anciens nous représentent les partisans de l'idée, et les Modernes ceux de la
réalité. Ni les uns ni les autres ne parvinrent à se dégager de cette opposition, et ils se
réalité. Ni les uns ni les autres ne parvinrent à se dégager de cette opposition, et ils se
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Modernes commencèrent à aspirer à la réalisation de cet esprit, réalisation qui doit
Modernes commencèrent à aspirer à la réalisation de cet esprit, réalisation qui doit
rester éternellement un « pieux souhait ».
rester éternellement un « pieux souhait ».
Le pium desiderium des Anciens était la sainteté, celui des Modernes est la corporalité.
Le pium desiderium des Anciens était la sainteté, celui des Modernes est la corporalité.
Mais de même que l'Antiquité devait succomber le jour où ses voeux seraient
Mais de même que l'Antiquité devait succomber le jour où ses voeux seraient
Max Stirner (1845), L’unique et sa propriété 282
comblés (car elle n'existait que par eux), de même il est à tout jamais impossible de
comblés (car elle n'existait que par eux), de même il est à tout jamais impossible de
parvenir à la corporalité sans sortir du cercle du Christianisme. Au courant de
parvenir à la corporalité sans sortir du cercle du Christianisme. Au courant de
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tout ». À ce que les Stoïques du paganisme vantent comme le « Sage » répond dans la
tout ». À ce que les Stoïques du paganisme vantent comme le « Sage » répond dans la
culture actuelle l' « Homme »; l'un et l'autre deux êtres — sans chair.
culture actuelle l' « Homme »; l'un et l'autre deux êtres — sans chair.
Le « sage » irréel, ce « saint » incorporel des Stoïques, est devenu une personne
Le « sage » irréel, ce « saint » incorporel des Stoïques, est devenu une personne
réelle et un « saint » corporel dans le Dieu « qui s'est fait chair »; l'Homme irréel, le
réelle et un « saint » corporel dans le Dieu « qui s'est fait chair »; l'Homme irréel, le
moi incorporel, deviendra réel dans le Moi corporel que Je suis.
moi incorporel, deviendra réel dans le Moi corporel que Je suis.
Au Christianisme est liée la question de « l'existence de Dieu »; cette question,
Au Christianisme est liée la question de « l'existence de Dieu »; cette question,
toujours et sans cesse reprise et débattue, prouve que le désir de l'existence, de la
toujours et sans cesse reprise et débattue, prouve que le désir de l'existence, de la
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n'eut pas d'autre objet ; bref, ce problème traverse d'un bout à l'autre l'histoire
n'eut pas d'autre objet ; bref, ce problème traverse d'un bout à l'autre l'histoire
chrétienne et ne peut trouver en elle sa solution.
chrétienne et ne peut trouver en elle sa solution.
Le monde chrétien travaille à réaliser des Idées dans toutes les circonstances de la
Le monde chrétien travaille à réaliser des Idées dans toutes les circonstances de la
vie individuelle et dans toutes les institutions et les lois de l'Église et de l'État ; mais
vie individuelle et dans toutes les institutions et les lois de l'Église et de l'État ; mais
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n'est pas possible de rendre corporel (d'irréalisable); avec quelque ardeur qu'on
n'est pas possible de rendre corporel (d'irréalisable); avec quelque ardeur qu'on
s'efforce de les doter d'un corps, toujours elles demeurent sans réalité tangible.
s'efforce de les doter d'un corps, toujours elles demeurent sans réalité tangible.
Le « réalisateur » d'idées s'inquiète peu des réalités, pourvu que ces réalités
Le « réalisateur » d'idées s'inquiète peu des réalités, pourvu que ces réalités
incarnent une idée ; aussi examine-t-il sans relâche si l'idée qui doit en être le noyau
incarnent une idée ; aussi examine-t-il sans relâche si l'idée qui doit en être le noyau
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bien réalisable comme il la pense, ou si elle n'est pensée par lui qu'à tort et par suite
bien réalisable comme il la pense, ou si elle n'est pensée par lui qu'à tort et par suite
inexécutable.
inexécutable.
En tant qu'existences, la Famille, l'État, etc., n'intéressent plus le Chrétien ; les
En tant qu'existences, la Famille, l'État, etc., n'intéressent plus le Chrétien ; les
Chrétiens ne doivent pas, comme les Anciens, se sacrifier pour ces « divines choses »,
Chrétiens ne doivent pas, comme les Anciens, se sacrifier pour ces « divines choses »,
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famille encore non divine, c'est-à-dire de tout asservir à l'idée, d'arborer partout la
famille encore non divine, c'est-à-dire de tout asservir à l'idée, d'arborer partout la
bannière de l'idée et d'amener l'idée à une réelle et efficace activité.
bannière de l'idée et d'amener l'idée à une réelle et efficace activité.
Max Stirner (1845), L’unique et sa propriété 283
 
Le Christianisme et l'Antiquité ayant affaire au divin finissent toujours par y
Le Christianisme et l'Antiquité ayant affaire au divin finissent toujours par y
revenir, quoique par les voies les plus opposées. À la fin du Paganisme, le divin
revenir, quoique par les voies les plus opposées. À la fin du Paganisme, le divin
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à fleurir dans tous les hommes et dans tout l'humain, et de pénétrer tout de l'Esprit. Il
à fleurir dans tous les hommes et dans tout l'humain, et de pénétrer tout de l'Esprit. Il
s'en tient à préparer un siège pour l'« Esprit ».
s'en tient à préparer un siège pour l'« Esprit ».
Si l'on en vint finalement à mettre l'accent sur l'Homme ou l'Humanité, ce fut de
Si l'on en vint finalement à mettre l'accent sur l'Homme ou l'Humanité, ce fut de
nouveau l'Idée que l'on « éternisa » : « L'Homme ne meurt pas ! » On pensa avoir
nouveau l'Idée que l'on « éternisa » : « L'Homme ne meurt pas ! » On pensa avoir
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que le Christ, L'Homme, moi de l'histoire du monde, clôt le cycle de la pensée
que le Christ, L'Homme, moi de l'histoire du monde, clôt le cycle de la pensée
chrétienne
chrétienne
Le cercle magique du Christianisme serait rompu si cessait le conflit entre
Le cercle magique du Christianisme serait rompu si cessait le conflit entre
l'existence et la vocation, c'est-à-dire entre Moi tel que je suis et Moi tel que je dois
l'existence et la vocation, c'est-à-dire entre Moi tel que je suis et Moi tel que je dois
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« parfait » flottent devant les yeux du Chrétien et représentent à son imagination le
« parfait » flottent devant les yeux du Chrétien et représentent à son imagination le
« jour dernier » ou le « but de l'histoire », mais ils ne sont pas pour lui un présent.
« jour dernier » ou le « but de l'histoire », mais ils ne sont pas pour lui un présent.
L'individu ne peut que prendre part à l'édification du royaume de Dieu — ou, en
L'individu ne peut que prendre part à l'édification du royaume de Dieu — ou, en
style moderne, au développement de l'histoire et de l'humanité, et c'est cette participation
style moderne, au développement de l'histoire et de l'humanité, et c'est cette participation
qui lui donne une valeur chrétienne ou, en style moderne, humaine ; pour le
qui lui donne une valeur chrétienne ou, en style moderne, humaine ; pour le
reste, il n'est qu'un tas de cendres et la pâture des vers.
reste, il n'est qu'un tas de cendres et la pâture des vers.
Que l'individu est pour soi une histoire du monde, et que le reste de l'histoire n'est
Que l'individu est pour soi une histoire du monde, et que le reste de l'histoire n'est
que sa propriété, cela dépasse la vue du Chrétien. Pour ce dernier, l'histoire est
que sa propriété, cela dépasse la vue du Chrétien. Pour ce dernier, l'histoire est
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l'humanité en tire perte ou profit. — Eh quoi ! Suis-je au monde pour y réaliser des
l'humanité en tire perte ou profit. — Eh quoi ! Suis-je au monde pour y réaliser des
idées ? pour apporter par mon civisme ma pierre à la réalisation de l'idée d'État, ou
idées ? pour apporter par mon civisme ma pierre à la réalisation de l'idée d'État, ou
Max Stirner (1845), L’unique et sa propriété 284
pour, par le mariage, donner une existence comme époux et père à l'idée de Famille ?
pour, par le mariage, donner une existence comme époux et père à l'idée de Famille ?
Que me veut cette vocation ? Je ne vis pas plus d'après une vocation que la fleur ne
Que me veut cette vocation ? Je ne vis pas plus d'après une vocation que la fleur ne
s'épanouit et n'exhale son parfum par devoir.
s'épanouit et n'exhale son parfum par devoir.
L'idéal « Homme » est réalisé lorsque la conception chrétienne se transforme et
L'idéal « Homme » est réalisé lorsque la conception chrétienne se transforme et
devient « Moi, cet Unique, je suis l'Homme ». La question : « Qu'est-ce que l'Homme?
devient « Moi, cet Unique, je suis l'Homme ». La question : « Qu'est-ce que l'Homme?
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plus une, car la réponse est personnellement présente dans celui qui interroge : la
plus une, car la réponse est personnellement présente dans celui qui interroge : la
question est sa propre réponse.
question est sa propre réponse.
On dit de Dieu : « Les noms ne le nomment pas. » Cela est également juste de
On dit de Dieu : « Les noms ne le nomment pas. » Cela est également juste de
Moi : aucun concept ne m'exprime, rien de ce qu'on donne comme mon essence ne
Moi : aucun concept ne m'exprime, rien de ce qu'on donne comme mon essence ne
m'épuise, ce ne sont que des noms. On dit encore de Dieu qu'il est parfait et n'a nulle
m'épuise, ce ne sont que des noms. On dit encore de Dieu qu'il est parfait et n'a nulle
vocation de tendre vers une perfection. Et Moi ?
vocation de tendre vers une perfection. Et Moi ?
Je suis le propriétaire de ma puissance, et je le suis quand je me sais Unique.
Je suis le propriétaire de ma puissance, et je le suis quand je me sais Unique.
Dans l'Unique, le possesseur retourne au Rien créateur dont il est sorti. Tout Être
Dans l'Unique, le possesseur retourne au Rien créateur dont il est sorti. Tout Être
supérieur à Moi, que ce soit Dieu ou que ce soit l'Homme, faiblit devant le sentiment
supérieur à Moi, que ce soit Dieu ou que ce soit l'Homme, faiblit devant le sentiment
de mon unicité et pâlit au soleil de cette conscience.
de mon unicité et pâlit au soleil de cette conscience.
Si je base ma cause sur Moi, l'Unique, elle repose sur son créateur éphémère et
Si je base ma cause sur Moi, l'Unique, elle repose sur son créateur éphémère et
périssable qui se dévore lui-même, et je puis dire :
périssable qui se dévore lui-même, et je puis dire :
Je n’ai basé ma cause sur Rien.
Je n’ai basé ma cause sur Rien.


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