Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 10 - la débâcle du libéralisme »

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Tout cela montre bien que les derniers libéraux commettaient une confusion profonde en entreprenant de définir les limites du domaine de l'Etat. Tout le régime de la propriété privée et des contrats, de l'entreprise individuelle, de l'association et de la société anonyme fait partie d'un ensemble juridique dont il est inséparable.  
Tout cela montre bien que les derniers libéraux commettaient une confusion profonde en entreprenant de définir les limites du domaine de l'Etat. Tout le régime de la propriété privée et des contrats, de l'entreprise individuelle, de l'association et de la société anonyme fait partie d'un ensemble juridique dont il est inséparable.  


On ne voit pas très bien comment une vérité aussi évidente avait pu échapper aux libéraux. Ils se représentaient sans doute le régime juridique de la propriété et des contrats comme une sorte de droit naturel fondé sur la nature des choses et possédant une valeur pour ainsi dire supra-humaine, sous prétexte que ce régime juridique, au lieu d'avoir été codifié en bonne et due forme, avait simplement été consacré par l'usage et la jurisprudence en vertu d'un droit coutumier. Ils en vinrent à considérer ce droit traditionnel de la propriété et des contrats comme le droit normal d'un régime de liberté, et chaque fois que l'on promulguait des dispositions qui ne leur plaisaient pas en vue de modifier la loi traditionnelle, ils les considéraient comme des ingérences de l'Etat.
On ne voit pas très bien comment une vérité aussi évidente avait pu échapper aux libéraux. Ils se représentaient sans doute le régime juridique de la propriété et des contrats comme une sorte de droit naturel fondé sur la nature des choses et possédant une valeur pour ainsi dire supra-humaine, sous prétexte que ce régime juridique, au lieu d'avoir été codifié en bonne et due forme, avait simplement été consacré par l'usage et la jurisprudence en vertu d'un droit coutumier. Ils en vinrent à considérer ce droit traditionnel de la propriété et des contrats comme le droit normal d'un régime de liberté, et chaque fois que l'on promulguait des dispositions qui ne leur plaisaient pas en vue de modifier la loi traditionnelle, ils les considéraient comme des ingérences de l'État.
 
Or la loi traditionnelle dans son état primitif n'existait naturellement qu'en fonction de la disposition de l'État à intervenir pour en assurer le respect. Les droits consacrés par cette loi pouvaient être sanctionnés par l'action du policier, du geôlier, voire du bourreau. Sans cette volonté d'intervention sous-entendue de la part de l'État, l'individualiste irréductible qui prêchait le laissez faire aurait été tout à fait sans défense. Il n'aurait pu obtenir ni remettre aucun titre de propriété valable. En dépit de toute sa liberté il n'aurait pas pu conclure le moindre contrat. Il n'aurait jamais pu former une société à responsabilité limitée dont les titres eussent été transmissibles à perpétuité par voie de succession. L'individualiste irréductible restait libre de s'imaginer que dans la vie économique il ne dépendait que de Dieu et de sa propre volonté. Mais en fait il était une personne juridique soumise au droit en vigueur à son époque. Car, comme l'a dit Ernest Barker : « Ce n'est pas le Moi naturel qui este en juste. C'est une personne possédant des droits et des obligations, créée par la loi, qui comparaît devant la loi<ref>Extrait de la préface du traducteur à l'ouvrage d'Otto Gierke : ''Natural Law and the Theory of Society'', vol. I, p. LXXI.</ref> ».  


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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