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modifications
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n'a pas tué les caisses libres, qui entrent pour une notable | n'a pas tué les caisses libres, qui entrent pour une notable | ||
proportion dans le fonctionnement de l'assurance. | proportion dans le fonctionnement de l'assurance. | ||
===Section 2. Sociétés coopératives complexes formées entre entreprises indépendantes.=== | |||
Envisageons maintenant la coopération pratiquée par des entreprises; | |||
il s'agit ici d2 sociétés coopératives ou syndicats peu importe - | |||
la forme juridique qui groupent les individus en leur qualité | |||
d'entrepreneurs de production ou de commerce. | |||
''§1. La coopération agricole.'' | |||
La croissance et la multiplication des associations agricoles est | |||
certainement l'un des événements les plus inattendus et les plus | |||
considérables de la fin du XIXème siècle. Sous l'empire des mêmes causes | |||
et des mêmes nécessités, elles ont surgi spontanément partout. Sans | |||
parler ici des anciennes sociétés agronomiques d'un caractère plutôt | |||
académique, ni des comices agricoles, ni des grandes ligues agraires | |||
plus modernes et plus bruyantes, comme les ''Bauervereine'' allemands, | |||
qui sont des partis organisés pour la lutte politique et la | |||
défense des intérêts généraux de l'agriculture, considérons les associations | |||
formées dans le but de rendre à leurs membres des services | |||
matériels, les seules qui aient un caractère vraiment coopératif. | |||
Déjà existaient d'ancienne date des associations de propriétaires | |||
ruraux, ayant pour objet l'exécution de travaux d'amélioration foncière, | |||
drainage, irrigation, curage, endiguement, etc. Mais dans les | |||
vingt dernières années du XIXème siècle, ce sont les cultivateurs eux-mêmes | |||
qui ont créé un vaste courant d'association. Achats en gros | |||
d'engrais, semences, fourrages, bestiaux et instruments de culture, | |||
usage commun de machines et de matériel agricole, élevage et amélioration | |||
du bétail, usage commun d'animaux reproducteurs, vente | |||
et exportation de produits agricoles, préparation industrielle et | |||
écoulement de produits tels que le beurre, le fromage et le vin, | |||
crédit agricole sous forme d'avances et d'escomptes, assurances | |||
agricoles contre l'incendie, la grêle, les accidents, la mortalité du | |||
bétail, il n'est pas un service, pas une fonction, pas une branche de | |||
l'activité agricole où la coopération n'ait pénétré, à l'exception toute | |||
fois de la fonction la plus importante, la culture, l'exploitation | |||
rurale proprement dite, qui est restée partout oeuvre individuelle. Et | |||
non seulement les cultivateurs ont su s'associer pour retirer de la | |||
coopération des avantages matériels, mais dans nombre d'associations, | |||
ils ont fait une place à des services d'ordre intellectuel et | |||
moral, comme l'enseignement agricole et l'assistance mutuelle. Puis | |||
les associations locales, pour multiplier leur puissance, se sont | |||
agglomérées en fédérations; de vastes unions, formées entre sociétés | |||
similaires ou même différentes, ont étendu leurs rameaux sur toute | |||
la surface d'un pays, comme une végétation naturelle librement | |||
sortie du sol. | |||
C'est que les mêmes causes, progrès des méthodes scientifiques, | |||
concurrence des pays neufs et crise des prix, ont partout déterminé | |||
le mouvement. Pour sauver le profit menacé, il a fallu faire de la | |||
culture rationnelle et intensive à base d'engrais, employer des | |||
machines, pratiquer la sélection des animaux et des plantes, perfectionner | |||
les procédés d'élaboration des produits; dans ces circonstances, | |||
l'exploitant isolé ne se suffisait plus à lui-même comme | |||
au temps de l'économie naturelle et de la culture routinière: l'association | |||
s'imposait pour les achats de matières et instruments, pour | |||
le traitement industriel des produits et l'organisation de la vente, | |||
comme pour le crédit et l'assurance. | |||
A ce mouvement universel d'association, le petit cultivateur a | |||
participé comme le gros fermier et le grand propriétaire; il s'y est | |||
même engagé plus avant, parce que l'association lui était plus | |||
nécessaire encore pour écarter certaines causes d'infériorité tenant a | |||
l'exiguïté de son entreprise. Quels sont en effet les pays où s'épanouissent | |||
les associations agricoles? Ce n'est pas l'Angleterre, pays | |||
de grande propriété; c'est la France, l'Allemagne (17 000 sociétés | |||
agricoles), l'Italie du Nord, c'est la Belgique et la Hollande, le Danemark | |||
et l'Irlande, pays de petite culture. Là, le paysan, souvent | |||
guidé et entraîné par des hommes d'initiative, en tout cas poussé | |||
par la nécessité, est sorti de son isolement traditionnel pour entrer | |||
dans la voie de la coopération. Le monde agricole subit actuellement | |||
une longue et profonde commotion; sous l'influence de l'enseignement, | |||
de la presse et de l'exemple, il s'opère dans les masses rurales | |||
une lente, mais sûre transformation des habitudes et des méthodes, | |||
dont nous ne pouvons aujourd'hui mesurer pour l'avenir l'étendue | |||
et les conséquences. | |||
''Sociétés d'achat.'' | |||
La forme la plus simple et la plus répandue de | |||
la coopération agricole est la coopération d'achat, qui fait l'objet | |||
essentiel des syndicats agricoles. Ces syndicats ont atteint en France | |||
un développement considérable depuis vingt ans; 660 000 cultivateurs | |||
sont groupés dans 3000 syndicats, d'importance d'ailleurs | |||
fort inégale, puisque les uns se restreignent à une commune, tandis | |||
que d'autres, comme ceux de la Sarthe, de la Vienne et de la Charente- | |||
Inférieure, s'étendent à un département tout entier, comptent | |||
10 000 à 15 000 membres, et font des achats d'engrais, matières et | |||
instruments pour 1 ou 2 millions; plusieurs d'entre eux possèdent | |||
de nombreux dépôts et magasins, où ils fabriquent parfois les | |||
engrais composés. Au total, on estime les achats ainsi réalisés par | |||
les syndicats français à 200 millions par an. | |||
Ce régime d'associations du premier degré se complète, et c'est là | |||
son caractère le plus remarquable, par une organisation fédérative | |||
très étendue et très souple, qui embrasse l'immense majorité des | |||
syndicats et leur rend le service de centraliser les achats en gros, | |||
sans cependant porter atteinte à l'autonomie des sociétés locales. Un | |||
réseau de 10 grandes fédérations régionales, dont les plus importantes, | |||
celles du Sud-Est et celle de Bourgogne et Franche-Comté, | |||
réunissent chacune 50 000 à 60000 cultivateurs; au sommet, l'Union | |||
centrale des syndicats des agriculteurs de France, qui groupe les | |||
syndicats et unions régionales les plus importants, puisque le chiffre | |||
de ses adhérents s'élève à 500 000; auprès de ces différentes unions, | |||
des sociétés coopératives filiales qui font les achats en gros par | |||
millions; tel est le magnifique ensemble qui s'est constitué spontanément | |||
au sein des populations rurales, sur la base solide des syndicats | |||
locaux. | |||
Dans les autres pays, les sociétés agricoles d'achat ne sont ni aussi | |||
nombreuses, ni aussi importantes qu'en France; elles jouent cependant | |||
un rôle très notable dans l'économie générale en Allemagne, | |||
en Belgique, en Hollande et en Suisse. Il faut d'ailleurs observer que | |||
d'autres associations, les caisses rurales et les Kornbauser en Allemagne, | |||
Autriche et Hongrie, les comices agricoles en Italie et en | |||
Belgique, opèrent également les achats collectifs pour leurs membres. | |||
En Allemagne, les sociétés d'achat se rattachent à un vaste système | |||
fédératif qui fait la force des associations agricoles de ce pays. La | |||
plupart d'entre elles appartiennent à la grande fédération nationale, | |||
le « Reichsverband der deutschen landwirtschaftiichen Genossen-schaften»; à un échelon intermédiaire, elles sont groupées en fédérations | |||
d'État ou de province et en sociétés centrales, qui possèdent | |||
comme les unions françaises, leur société d'achats en gros et leurs | |||
magasins. Les syndicats belges ont une organisation analogue. De | |||
même, l'Union des sociétés agricoles de la Suisse orientale possède | |||
un magasin central, dont les achats en gros montent à plusieurs | |||
millions. | |||
Ainsi, de quelque côté que nous portions nos regards, nous | |||
voyons les agriculteurs, comme les consommateurs eux-mêmes, | |||
s'organiser pour leurs achats, relier en fédérations leurs groupes | |||
primaires, concentrer le service des achats en gros dans des sociétés | |||
centrales, de manière à obtenir par leur union des rabais plus considérables | |||
et des garanties plus sérieuses pour la pureté des produits | |||
qui leur sont nécessaires. C'est ainsi que le petit cultivateur, dans | |||
ses achats les plus minimes, s'assure des avantages qu'il n'aurait | |||
jamais pu obtenir isolément, et qui semblaient réservés à la grande | |||
exploitation. | |||
'' | |||
Sociétés de vente.'' | |||
L'organisation collective de la vente, de | |||
l'expédition et de l'exportation des produits agricoles présente beaucoup | |||
plus de difficultés que celle de l'achat des matières et instruments | |||
nécessaires à l'agriculture. Du côté des administrateurs, elle | |||
suppose l'art de présenter les produits suivant les goûts de la clientèle, | |||
et de les grouper en vue de l'expédition la pratique des procédés | |||
commerciaux, tels que confection des bulletins de prix courants, | |||
envois de prospectus et d'échantillons, emploi de voyageurs et | |||
représentants; la connaissance exacte des marchés, des débouchés, | |||
des conditions économiques, des tarifs de transport et de douane; | |||
en un mot, des capacités et une expérience commerciale qui appartiennent | |||
à des négociants de métier bien plutôt qu'& de simples | |||
agriculteurs délégués dans ces fonctions. De la part des associés euxmêmes, | |||
il faut obtenir la bonne qualité constante et l'uniformité des | |||
produits, en imposant au besoin des procédés semblables de culture | |||
et de traitement; les associés doivent s'astreindre à fournir des | |||
livraisons régulières, et réserver leur production au syndicat pour | |||
le prix qu'il est en mesure d'offrir, sans se laisser détourner par des | |||
sollicitations étrangères. Ces conditions multiples sont si difficiles à | |||
réunir, que les tentatives d'organisation, beaucoup plus rares jusqu'ici | |||
pour la vente que pour l'achat, ont fréquemment échoué, soit | |||
par incapacité des gérants, soit par indifférence ou mauvaise foi | |||
des associés. Les syndicats qui ont essayé de se constituer en | |||
organes de ventes sous la forme la plus lâche, se bornant à trans' | |||
234 LES SYSTÈMES SOCIALISTES ET L'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE | |||
mettre les commandes à leurs membres sans contracter personnellement, | |||
ont eux-mêmes éprouvé d'assez nombreux insuccès. | |||
Toutefois, le mouvement est commencé, et il a déjà donné des | |||
résultats appréciables dans divers pays. Sans parler encore des | |||
'coopératives agricoles de production, si prospères dans certaines | |||
branches, on peut signaler bien des sociétés spécialement instituées | |||
pour la vente des produits agricoles qui fonctionnent aujourd'hui | |||
'd'une façon satisfaisante. | |||
En France, les meilleurs résultats ont été obtenus jusqu'à ce jour | |||
par des sociétés locales qui ont organisé la vente des produits spé- | |||
'ciaux de leur territoire, légumes verts, fleurs, fraises, huile d'olive, | |||
vins, cidres, beurres et fromages; des syndicats d'exportation se | |||
sont fondés dans les régions qui expédient leurs légumes et leurs | |||
"fruits en Angleterre. En outre le Syndicat central des agriculteurs | |||
de France a établi un office qui sert d'intermédiaire entre ses membres | |||
pour les achats et ventes réciproques de semences, fourrages et | |||
aliments du bétail. Au Danemark, sous l'influence de sociétés spé- | |||
'ciales, qui se sont fédérées pour centraliser le service et renforcer le | |||
-contrôle de la qualité des produits, l'exportation des oeufs a triplé | |||
dans ces dix dernières années. Il existe également des syndicats de | |||
vente pour les légumes et les fruits en Italie et en Californie, pour | |||
les oeufs et la volaille en Irlande, pour les oeufs en Hongrie. | |||
L'Allemagne est le pays qui a fait le plus d'efforts en ce sens. | |||
Nombreuses sont les sociétés agricoles qui ont entrepris la vente du | |||
bétail, des oeufs, du tabac, du houblon et autres produits spéciaux. | |||
Une Société centrale pour la vente des bestiaux a réalisé, en 1902, | |||
un chiffre d'affaires de 100 millions de francs; elle a créé à Berlin un | |||
marché spécial pour le bétail, et elle s'efforce d'étendre les débouchés | |||
au dehors; mais l'absence d'organisations locales est pour elle une | |||
source de faiblesse. Quelques sociétés régionales ont entrepris la | |||
vente du beurre sur une petite échelle; d'autres se sont formées pour | |||
la vente du lait; pendant plusieurs mois, en 1904, l'association des | |||
paysans du Brandebourg a soutenu à Berlin la lutte contre les | |||
commerçants, dans le but de maintenir des prix rémunérateurs et | |||
d'atteindre directement les consommateurs. Des cultivateurs de | |||
betteraves se sont également syndiqués pour défendre leur position | |||
de vendeurs contre le cartel du sucre. | |||
Ces tentatives, si intéressantes soient-elles, ne sauraient avoir une | |||
portée considérable; pour qu'une profonde transformation économique | |||
s'opérât, il faudrait que les agriculteurs parvinssent à organiser | |||
la vente collective d'une denrée de très large consommation | |||
LA COOPÉRATION S3S | |||
comme le blé. Les Allemands n'ont pas reculé devant les difficultés | |||
du problème. | |||
Dans diverses régions de l'Allemagne et de l'Autriche, des magasins | |||
de hlé (~brM/MMM?-)de contenance variée ont été construits par | |||
des sociétés coopératives isolées ou affiliées aux grandes fédérations | |||
agricoles, généralement avec le concours du budget de l'État. Le blé, | |||
déposé par les associés, est nettoyé, séché, classé, mélangé suivant | |||
un type uniforme propre à la vente. Les sociétés n'obligent leurs | |||
membres à apporter au magasin la totalité de leur récolte que dans | |||
les régions de grande propriété. Les unes achètent et revendent le | |||
blé à leur compte; les autres se bornent à le recevoir en dépôt et à | |||
servir d'intermédiaires pour la vente, sauf à consentir des avances | |||
aux déposants. Dans les régions exportatrices du nord et de l'est, les | |||
/tofMAaMM?'font mieux encore; ils entreprennent eux-mêmes l'exportation, | |||
quand elle leur paraît nécessaire pour dégager le marché | |||
intérieur. | |||
Les ventes ont déjà acquis une certaine importance, puisqu'en 1902 | |||
on les évaluait, pour l'ensemble des 170 sociétés coopératives se | |||
livrant à la vente des céréales, au chiffre de 6 millions de quintaux. | |||
Bien que ce chiffre ne représente encore qu'une petite fraction du | |||
commerce des céréales en Allemagne, il est loin d'être négligeable. | |||
Dès à présent, ces sociétés rendent à leurs membres le service de les | |||
affranchir du commerce; elles participent directement aux adjudications | |||
les plus importantes; grâce à leurs achats fermes ou à leurs | |||
avances, les petits propriétaires, en Bavière et ailleurs, échappent à | |||
la nécessité de vendre à tout prix après la récolte; grâce à elles également, | |||
les cultivateurs, là où elles fonctionnent, reçoivent des prix de | |||
vente locaux qui ne sont pas inférieurs aux cours cotés en bourse. | |||
Pour l'avenir, elles espèrent réussir à former un jour un vaste | |||
cartel qui dominera le marché intérieur, libérera l'agriculture de la | |||
spéculation, régularisera les cours à l'abri des tarifs douaniers, et | |||
réglementera souverainement les emblavures suivant les besoins | |||
présumés de la consommation. Espérance lointaine, si l'on considère | |||
les difficultés de tout genre, le grand nombre et la dispersion des | |||
producteurs, la concurrence du blé étranger, l'ampleur de l'entreprise, | |||
les charges financières qui pèsent sur les sociétés existantes, | |||
leur petit nombre et leur défaut de cohésion; une organisation | |||
collective sérieuse de la vente des produits agricoles ne pourrait se | |||
réaliser que par la multiplication des coopératives locales reliées entre | |||
elles par un cartel. Mais cette espérance suffit à soutenir les agrariens | |||
allemands dans leurs efforts; quelques-uns rêvent déjà d'une | |||
'236 LES SYSTÈMES SOCIALISTES ET L'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE | |||
f. 1 1 | |||
organisation internationale de la vente du blé. De fait, on signale | |||
des magasins coopératifs en Autriche et même aux États-Unis, où | |||
il existe un grand nombre d'e~ua~f.! coopératifs à côté des grandes | |||
entreprises capitalistes d'emmagasinage 1. | |||
6'ocicM.?d'assurances, d'élevage, etc. En dehors de l'achat et de la | |||
vente, la coopération, en agriculture, s'applique encore à de multiples | |||
objets. C'est ainsi que l'assurance mutuelle fait de rapides | |||
progrès dans les campagnes, principalement l'assurance contre la | |||
mortalité du bétail. Les petites mutuelles agricoles sont très nombreuses | |||
en France, où elles forment généralement un service annexe | |||
des syndicats d'achat. Aux États-Unis, 2 millions de farmers font | |||
partie de ces sociétés. En Belgique, les sociétés d'assurance mutuelle | |||
contre la mortalité du bétail (842) qui assurent une valeur de | |||
75 millions de francs, se relient dans les grandes fédérations agricoles | |||
à des caisses centrales de réassurance. | |||
Des syndicats se sont encore constitués; en France et à l'étranger, | |||
pour mettre à la disposition de leurs membres des machines coûteuses: | |||
batteuses à vapeur, charrues défonceuses, trieurs à grains, matériel | |||
de vinification, moulins à huile, etc. D'autres ont pour but la défense | |||
commune contre certains fléaux de l'agriculture phylloxéra et | |||
autres maladies de la vigne, insectes nuisibles, etc. Les syndicats | |||
d'élevage, en France et en Suisse, visent à améliorer les races d'animaux | |||
par le choix des reproducteurs mis à la disposition des associés; | |||
ils tiennent des registres généalogiques qui assurent aux sujets | |||
inscrits une plus-value certaine. Aux États-Unis, les sociétés agricoles | |||
pour l'adduction de l'eau, le transport par eau des céréales et | |||
des fruits, le téléphone et l'éclairage électrique, se chiffrent par | |||
milliers. | |||
~octe~s agricoles de production. Les coopératives agricoles de | |||
production ont un tout autre caractère que les coopératives de production | |||
industrielle. Ce ne sont pas des associations de travailleurs | |||
fournissant à la société leur travail manuel, comme pourraient l'être | |||
du reste, en agriculture même, des sociétés de cultivateurs fusionnant | |||
leurs exploitations pour pratiquer la culture en commun 2; ce | |||
sont des entreprises annexes, fondées par les cultivateurs en dehors | |||
de leurs exploitations agricoles restées indépendantes, dans le but | |||
1. Souchon, Leseo-M~ de f~'MM~Mreen Allemagne,p. 39et s. Muséesocial, | |||
~HKa/es,juillet 1902. L'organisation coopérative de la vente des céréales en | |||
~/e!?:a.</neet en ~<c/!p. Ministère de l'agriculture, Bulletin mensue). avritjuin | |||
iSOi. | |||
2. On signale toutefois en Sicile, en Corse et en Algérie quelques essais tout | |||
récents de coopérativesde travail prenant a. bail un domaine pour le cultiver. | |||
LA. COOPÉRATION 237 | |||
de donner à leurs produits une certaine élaboration industrielle et de | |||
les écouler sous leur nouvelle forme. Ici donc, la coopération consiste, | |||
de la part du sociétaire, non pas à fournir son travail le cas | |||
est exceptionnel, mais à livrer ses produits et à profiter des services | |||
rendus par la société. | |||
La coopération de production est encore rare, parmi les agriculteurs, | |||
pour la fabrication du pain et la préparation de la viande de | |||
boucherie. Les boulangeries coopératives rurales sont nombreuses, | |||
mais elles ont pour but de distribuer le pain à leurs membres, et doiventêtre | |||
par conséquent rangées parmi les sociétés de consommation. | |||
Quant aux moulins coopératifs et boulangeries établis par des cultivateurs | |||
de blé pour la vente aux consommateurs, ils sont tout à | |||
fait exceptionnels en France et au dehors; ce n'est guère qu'en Prusse | |||
que les moulins coopératifs ont pris quelque extension. Du côté des | |||
éleveurs, les tentatives faites pour créer des abattoirs ei. des boucheries | |||
coopératives vendant la viande au détail ont généralement échoué, | |||
àcausedel'indiS'érence des associés ou de l'indélicatesse des gérants. | |||
Pour les deux articles les plus importants de l'agriculture et de l'alimentation, | |||
le pain et la viande, les producteurs ne sont donc pas encore | |||
parvenus à établir des relations directes avec les consommateurs. | |||
De même, les coopératives agricoles sont encore peu nombreuses | |||
dans certaines industries dérivées telles que la brasserie, la féculerie, | |||
la fabrication des conserves, de l'huile, du sucre, de la chicorée, etc. | |||
Les distilleries coopératives, il est vrai, paraissent s'accroître dans | |||
certains pays; mais il en est peu qui soient de véritables entreprises | |||
coopératives, formées par des producteurs agricoles. Peut-être la | |||
coopération s'étendra-t-eUe un jour dans ces différentes industries | |||
de transformation; mais, actuellement, il faut reconnaître qu'elle y | |||
est très peu développée. | |||
Au contraire, la coopération s'est appliquée avec un plein succès à | |||
la production du beurre et du fromage. La concentration de l'industrie | |||
du beurre dans les laiteries coopératives est une conséquence de | |||
l'introduction des écrémeuses centrifuges à vapeur. Du jour, en effet, | |||
ou la fabrication du beurre est devenue mécanique, elle a dû sortir | |||
de la sphère des préparations domestiques qui se font à la ferme; elle | |||
réclamait un mode de travail collectif, et des capitaux qui ne pouvaient | |||
se détourner de i'ag'riculture; elle cessait donc d'être une | |||
occupation accessoire des cultivateurs pour devenir une industrie | |||
-distincte. Mais comme elle n'exigeait pas des capitaux aussi considérables | |||
que la fabrication du sucre, elle convenait parfaitement à la | |||
coopération. | |||
238 LES SYSTÈMES SOCIALISTES ET L'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE | |||
Pour la fondation d'une laiterie, un certain nombre d'herbagers | |||
s'associent; ils apportent leurs capitaux, ou bien ils empruntent le | |||
surplus nécessaire; ils s'engagent à fournir tout leur lait à la coopérative, | |||
et, après avoir fixé la rémunération du capital à un taux invariable, | |||
ils se répartissent l'excédent du bénéfice au prorata du lait | |||
qu'ils ont livré. Cette combinaison est éminemment favorable aux | |||
petits cultivateurs; grâce à l'association, ils produisent le beurre suivant | |||
les procédés les plus perfectionnés, en réalisant de notables économies | |||
ils utilisent les sous-produits dans des porcheries annexes; | |||
ils organisent la vente et les envois à l'étranger. La société coopérative | |||
contrôle la qualité des livraisons, garantit la pureté des produits, | |||
et agit sur ses membres pour l'amélioration du bétail et des pâtures. | |||
Aussi les laiteries coopératives sont-elles devenues, depuis une | |||
vingtaine d'années, un organe essentiel de l'économie rurale dans | |||
tous les pays de pâturages, principalementpour les petits cultivateurs | |||
possédant une ou deux vaches. En France, leur groupe principal se | |||
trouve dans les Charentes et le Poitou, où elles se sont réunies en | |||
Association centrale pour les achats collectifs; l'Association se compose | |||
de 50000 cultivateurs possédant chacun deux vaches en | |||
moyenne, et réalise un chiffre de ventes de 24 millions; mais elle n'a | |||
pas encore su organiser l'exportation. En Belgique, les laiteries coopératives | |||
comprennent 47 000 sociétaires, et vendent pour 22 millions | |||
de produits. En Irlande, elles ont 24000 membres et font un | |||
chiffre d'affaires semblable. En Allemagne, elles sont très nombreuses | |||
un millier d'entre elles, 1200 sur 2S42, réunies dans le | |||
Reichsverband, comptent 110000 adhérents, et leur paient dans | |||
l'année 123 millions de francs pour le lait qu'elles en reçoivent. On | |||
les rencontre encore en Suisse, dans l'Italie du Nord, au Tyrol, en | |||
Hollande, en Hongrie, en Suède et Norvège, en Finlande, aux Etats- | |||
Unis, au Canada, jusqu'en Australie, en Nouvelle-Zélande et en | |||
Sibérie. Partout elles s'ingénient à trouver des débouchés; elles | |||
fondent des agences et magasins de vente, installent des services | |||
frigorifiques pour le transport, et cherchent généralement, avec | |||
l'appui des pouvoirs publics, à conquérir le marché anglais. | |||
Mais c'est surtout au Danemark que les paysans, associés dans les | |||
laiteries coopératives, ont obtenu les plus beaux résultats. Dans ce | |||
pays, les petits propriétaires cultivateurs, qui occupent la plus | |||
grande partie du sol, sont presque tous affiliés à des sociétés agricoles | |||
comme consommateurs ou comme producteurs. Les laiteries | |||
coopératives, qui comprennent 150000 membres, attirent à elles | |||
presque tout le lait du pays en offrant les prix les plus avantageux, | |||
LA COOPÉRATION &39' | |||
.11. | |||
et vendent annuellement du beurre pour une somme de 210 millionsde | |||
francs. Elles ont su faire l'éducation du cultivateur comme herbager | |||
et nourrisseur. Elles ont aussi organisé l'exportation sur des. | |||
bases excellentes fédérées dans ce but, elles donnent à leurs produits | |||
la garantie d'une marque unique, les préparent suivant les convenances | |||
particulières de leur clientèle anglaise, et sont ainsi parvenues | |||
à fournir à l'Angleterre près de la moitié du beurre que ce pays | |||
demande a l'étranger. Les exportations de beurre danois se sont élevées | |||
en vingt-deux ans de 28 à 213 millions de francs; ce succès peut | |||
être attribué complètement à la coopération, dont les premiers essais | |||
ne remontent pas au delà de 1883. | |||
Il faut mettre en regard de ces résultats ceux qui ont été obtenus | |||
par les abattoirs et les fabriques coopératives de salaisons de porc, | |||
industrie annexe de celle du beurre un débit de 60 millions de francs, | |||
un même étan donné à l'exportation vers l'Angleterre. Les coopératives | |||
agricoles danoises sont devenues les principaux fournisseurs.. | |||
des sociétés de consommation anglaises. Des relations permanentes | |||
se sont établies entre les Unions danoises d'exportation eties IfAo~esales, | |||
et leurs marchés portent sur le lait, le beurre, le lard et les | |||
oeufs par quantités considérables (63 millions de fr. en 1903). | |||
Ce mouvement coopératif au Danemark est d'autant plus remarquable, | |||
qu'il est dû à l'initiative des petits cultivateurs; les propriétaires | |||
des grandes fermes et des châteaux n'y ont adhéré que plustard, | |||
sous l'empire de la nécessité. Les laiteries coopératives, en donnant | |||
de plus hauts prix et en exerçant un contrôle rigoureux sur les | |||
livraisons de leurs membres, ont triomphé desfabriques capitalistes; | |||
celles-ci disparaissent peu à peu devant la concurrence coopérative. | |||
Le même phénomène s'observe d'ailleurs en Suède, en Belgique, dans | |||
l'ouest de la France et aux États-Unis J. | |||
Dans divers pays comme l'Italie du Nord, les laiteries coopératives | |||
fabriquent en même temps du fromage; ailleurs, les fromageries cool. | |||
DeRocquigny,La coopérationdeproductionen a~'cMHM!'?,p. 88, Guillaumin, | |||
1896,in-8". – Tiéfaine, ~M ~HertM coop~-a~'UMe~ France, p. 23, 247, 2SS, 290, | |||
Lille, Robbe, 1901,in-8". Destrée et Vandervetde, Le socialisme en Belgique, | |||
p. 328,Giard, 1898,in-8°. Cesfaits ne confirmentpas les pronosticsde M.Kautsky. | |||
Aprèsun tableau lamentable de la situation du paysan coopérateur, tyrannisé par | |||
l'association, contraint par elle d'améliorer ses procédésde culture et d'élevage, | |||
privé par elle du lait nécessaire à son alimentation, M. Kaatshy prévoitune crise | |||
de l'industrie laitière qui sapera de nombreuses existences d'agriculteurs, et | |||
annonce commefin inévitable des coopérativesagricoles de production leur transformation | |||
en fabriques capitalistes (La question agraire, trad. Milhaud, p. 419, | |||
Giard, tMO,m-8°).Comp.VanderveMe,La coopérationrurale en Belgique, Revued'économie | |||
politique, fév. i902, p. 145. | |||
-240 LES SYSTÈMES SOCIALISTES ET L'ÈVOLUTION ÉCONOMIQUE | |||
.pératives existent à l'état distinct. Ainsi fonctionnent les nombreuses | |||
et antiques /rMt~erM de la Suisse et du Jura français, modestes asso- | |||
'ciations qui peuvent se constituer avec un capital très restreint. Des | |||
sociétés semblables existent encore en Allemagne, en Hollande et dans | |||
d'autres pays. Mais la fabrication du fromage, n'exigeant pas un | |||
matériel coûteux, se fait souvent encore à la ferme, et ne réclame pas | |||
la coopération comme la fabrication du beurre. | |||
Il reste enfin à signaler, parmi les coopératives agricoles de pro- | |||
-duction, les caves coopératives, IFMseroerctHc de l'Allemagne et de | |||
la Suisse, jSMerc~eKosMHscAa/~H de la Transylvanie et du Tyrol, | |||
Cantine sociali italiennes. Il faut aller dans les vallées de l'Ahr, du | |||
Rhin et de la Moselle pour voir, comme au Danemark, ce que peut | |||
réaliser le paysan par ses propres efforts, quand il est animé d'un | |||
.esprit d'association résolu et agissant. Par leurs coopératives, les | |||
petits vignerons ont su se contraindre réciproquement à l'améliora- | |||
.tion de leurs procédés de culture, créer des caves collectives, appliquer | |||
les méthodes scientifiques à la vinification et à la conservation | |||
du vin, et obtenir un produit parfaitement sain, durable et homo- | |||
..gène Ils ont entrepris d'organiser la vente et d'atteindre directement | |||
le consommateur; leurs efforts dans cette voie, contrariés | |||
par les résistances du commerce de détail, ont été peut-être moins | |||
heureux; mais les conventions passées par les coopératives viticoles | |||
-avec les syndicats de négociants en vins paraissent donner de bons | |||
résultats. | |||
~oc!<~M de crédit caisses }'K)'a'7es. L'agriculteur a besoin de | |||
-crédit, puisque la culture intensive exige des capitaux; le paysan, | |||
jadis opprimé par l'usurier, a appris à s'en procurer par l'association. | |||
Dans les caisses rurales, les associés se fournissent mutuellement le | |||
crédit, soit en apportant des capitaux, soit en les empruntant sous | |||
fleur responsabilité collective, limitée ou solidaire. Les caisses locales | |||
reçoivent les épargnes en dépôt, font des avances à leurs membres | |||
ou escomptent leurs effets; les caisses centrales des unions fournis- | |||
.sent parfois aux caisses affiliées le fonds de roulement, réescomptent | |||
les effets, et règlent les mouvements de fonds entre les caisses | |||
locales suivant leurs besoins particuliers. | |||
Depuis les premières fondations des grands initiateurs, Raiffeisen | |||
'et Schulze-Delitzsch, qui remontent à un demi-siècle à peine, la coopération | |||
de crédit a pris un immense développement dans certains | |||
pays. L'Allemagne, qui en fut le berceau, tient la tête du mouve- | |||
1. Berget,La coopérationdans ta viticultureeuropéenne,Lille, Devos,1902,in-8". | |||
LA COOPÉRATION s.4i | |||
LES SYSTÈMES SOCIALISTES. 16 | |||
ment 13 000 sociétés de crédit, la plupart affiliées au Reichsverband, | |||
d'autres à des Unions régionales moins considérables, d'autres enfin, | |||
'comprenant à la fois des agriculteurs, des commerçants et des industdureniel1sc6, | |||
a0p0àital0l'U,0n0ioamcnteimognbésrneésr,eatlecfoodmnedpssossédoecidérteééssceurlSvtiecv,hauteldzueer-sD37el0iptzomsucrihll;iloenssutrnodipseerfqsrouanannrctessl; | |||
un chiffre d'avances, en fin d'année (1903), dépassant 2 milliards; | |||
pour compléter le système et fortifier les sociétés locales, des caisses | |||
centrales établies par les grandes Unions; au sommet, la Caisse | |||
centrale des associations coopératives, créée par l'État pour faire des | |||
-avances à un taux modéré et remplir l'office de banque régulatrice | |||
des mouvements de fonds; tel est l'imposant édifice du crédit coopératif | |||
en Allemagne. | |||
nisAatuiocnun gpaeryms anniequpe;eut troiuvtaelfisoeisr, avle'Acutcriecthtee vapstreésenettepuieslslaen-mteêmeorgau-n | |||
'ensemble considérable de 5 600 caisses de crédit, avec 1 325 000 adhérents | |||
et un capital de 165 millions de francs. Partout ailleurs, les | |||
-caisses rurales jouent un rôle plus modeste; mais si la Suisse et le | |||
Danemark n'en comptent qu'un petit nombre, si les pays anglo- | |||
'saxons paraissent décidément réfractaires à cette forme de la coopération, | |||
les banques agricoles progressent sensiblement en Hongrie | |||
-(t 6SOsociétés, 367000 adhérents), en Italie, en Roumanie, en Russie, | |||
en Serbie, en Belgique et en Hollande. La France est un des pays où | |||
l'organisation du crédit agricole est la moins avancée 1500 caisses | |||
rurales, la plupart très restreintes, 41 caisses régionales, un chiffre | |||
,de prêts ne dépassant pas annuellement 65 millions, c'est peu relativement | |||
à l'Allemagne et à l'Autriche; mais le mouvement y est | |||
-encore récent. |
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