Différences entre les versions de « Jean-Baptiste Say:Traité d'économie politique - Livre I - Chapitre VIII »

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Version du 1 mars 2008 à 17:33


Jean-Baptiste Say:Traité d'économie politique - Livre I - Chapitre VIII


Anonyme


Livre Premier
Chapitre VIII - Des avantages, des inconvénients et des bornes qui se rencontrent dans la séparation des travaux.


Nous avons déjà remarqué que ce n'est pas ordinairement la même personne qui se charge des différentes opérations dont l'ensemble compose une même industrie : ces opérations exigent pour la plupart des talents divers, et des travaux assez considérables pour occuper un homme tout entier. Il est même telle de ces opérations qui se partage en plusieurs branches, dont une seule suffit pour occuper tout le temps et toute l'attention d'une personne.

C'est ainsi que l'étude de la nature se partage entre le chimiste, le botaniste, l'astronome et plusieurs autres classes de savants.

C'est ainsi que, lorsqu'il s'agit de l'application des connaissances de l'homme à ses besoins, dans l'industrie manufacturière, par exemple, nous trouvons que les étoffes, les faïences, les meubles, les quincailleries, etc., occupent autant de différentes classes de fabricants.

Enfin, dans le travail manuel de chaque industrie, il y a souvent autant de classes d'ouvriers qu'il y a de travaux différents. Pour faire le drap d'un habit, il a fallu occuper des fileuses, des tisseurs, des fouleurs, des tondeurs, des teinturiers, et plusieurs autres sortes d'ouvriers, dont chacun exécute toujours la même opération.

Le célèbre Adam Smith a le premier fait remarquer que nous devions à cette séparation des différents travaux, une augmentation prodigieuse dans la production, et une plus grande perfection dans les produits.

Il cite comme un exemple, entre beaucoup d'autres, la fabrication des épingles. Chacun des ouvriers qui s'occupent de ce travail ne fait jamais qu'une partie d'une épingle. L'un passe le laiton à la filière, un autre le coupe, un troisième aiguise les pointes ; la tête seule de l'épingle exige deux ou trois opérations distinctes, exécutées par autant de personnes différentes.

Au moyen de cette séparation d'occupations diverses, une manufacture assez mal montée, et où dix ouvriers seulement travaillaient, était en état de fabriquer chaque jour, au rapport de Smith, quarante-huit mille épingles.

Si chacun de ces dix ouvriers avait été obligé de faire des épingles les unes après les autres, en commençant par la première opération et en finissant par la dernière, il n'en aurait peut-être terminé que vingt dans un jour ; et les dix ouvriers n'en auraient fait que deux cents au lieu de quarante-huit mille.

Smith attribue ce prodigieux effet à trois causes.

Première cause. -- L'esprit et le corps acquièrent une habileté singulière dans les occupations simples et souvent répétées. Dans plusieurs fabrications, la rapidité avec laquelle sont exécutées certaines opérations passe tout ce qu'on croirait pouvoir attendre de la dextérité de l'homme.

Deuxième cause. -- On évite le temps perdu à passer d'une occupation à une autre, à changer de place, de position et d'outils. L'attention, toujours paresseuse, n'est point tenue à cet effort qu'il faut toujours faire pour se porter vers un objet nouveau, pour s'en occuper.

Troisième cause. -- C'est la séparation des occupations qui a fait découvrir les procédés les plus expéditifs ; elle a naturellement réduit chaque opération à une tâche fort simple et sans cesse répétée : or, ce sont de pareilles tâches qu'on parvient plus aisément à faire exécuter par des outils ou machines.

Les hommes d'ailleurs trouvent bien mieux les manières d'atteindre un certain but, lorsque ce but est proche, et que leur attention est constamment tournée du même côté. La plupart des découvertes, même celles que les savants ont faites, doivent être attribuées originairement à la subdivision des travaux, puisque c'est par une suite de cette subdivision que des hommes se sont occupés à étudier certaines branches de connaissances exclusivement à toutes les autres ; ce qui leur a permis de les suivre beaucoup plus loin.

Ainsi les connaissances nécessaires pour la prospérité de l'industrie commerciale, par exemple, sont bien plus perfectionnées quand ce sont des hommes différens qui étudient : l'un, la géographie, pour connaître la situation des états et leurs produits ; l'autre, la politique, pour connaître ce qui a rapport à leurs lois, à leurs mœurs, et quels sont les inconvénients ou les secours auxquels on doit s'attendre en trafiquant avec eux ; l'autre, la géométrie, la mécanique, pour déterminer la meilleure forme des navires, des chars, des machines ; l'autre, l'astronomie, la physique, pour naviguer avec succès, etc.

S'agit-il de la partie de l'application dans la même industrie commerciale, on sentira qu'elle sera plus parfaite lorsque ce seront des négocians différens qui feront le commerce d'une province à l'autre, le commerce de la Méditerranée, celui des Indes orientales, celui d'Amérique, le commerce en détail, etc., etc.

Cela n'empêche nullement de cumuler les opérations qui ne sont pas incompatibles, et surtout celles qui se prêtent un appui mutuel. Ce ne sont point deux négocians différens qui transportent dans un pays les produits que ce pays consomme, et qui rapportent les produits qu'il fournit, parce que l'une de ces opérations n'exclut pas l'autre, et qu'elles peuvent, au contraire, être exécutées en se prêtant un appui mutuel.

La séparation des travaux, en multipliant les produits relativement aux frais de production, les procure à meilleur marché. Le producteur, obligé par la concurrence d'en baisser le prix de tout le montant de l'économie qui en résulte, en profite beaucoup moins que le consommateur ; et lorsque le consommateur met obstacle à cette division, c'est à lui-même qu'il porte préjudice.

Un tailleur qui voudrait faire non-seulement ses habits, mais encore ses souliers, se ruinerait infailliblement.

On voit des personnes qui font, pour ce qui les regarde, les fonctions du commerçant, afin d'éviter de lui payer les profits ordinaires de son industrie ; elles veulent, disent-elles, mettre ce bénéfice dans leur poche. Elles calculent mal : la séparation des travaux permet au commerçant d'exécuter pour elles ce travail à moins de frais qu'elles ne peuvent le faire elles-mêmes.

Comptez, leur dirais-je, la peine que vous avez prise, le temps que vous avez perdu, les faux frais, toujours plus considérables à proportion dans les petites opérations que dans les grandes ; et voyez si ce que tout cela vous coûte n'excède pas deux ou trois pour cent que vous épargnerez sur un chétif objet de consommation, en supposant encore que ce bénéfice ne vous ait pas été ravi par la cupidité de l'agriculteur ou du manufacturier avec qui vous avez traité directement, et qui ont dû se prévaloir de votre inexpérience.

Il ne convient pas même à l'agriculteur et au manufacturier, si ce n'est dans des circonstances très-particulières, d'aller sur les brisées du commerçant, et de chercher à vendre sans intermédiaire leurs denrées au consommateur. Ils se détourneraient de leurs soins accoutumés, et perdraient un temps qu'ils peuvent employer plus utilement à leur affaire principale ; il faudrait entretenir des gens, des chevaux, des voitures dont les frais surpasseraient les bénéfices du négociant, communément très-réduits par la concurrence.

On ne peut jouir des avantages attachés à la subdivision des travaux que dans certains produits, et lorsque la consommation des produits s'étend au-delà d'un certain point.

Dix ouvriers peuvent fabriquer quarante-huit mille épingles dans un jour ; mais ce ne peut être que là où il se consomme chaque jour un pareil nombre d'épingles ; car, pour que la division s'étende jusque-là, il faut qu'un seul ouvrier ne s'occupe absolument que du soin d'en aiguiser les pointes, pendant que chacun des autres ouvriers s'occupe d'une autre partie de la fabrication.

Si l'on n'avait besoin dans le pays que de vingt-quatre mille épingles par jour, il faudrait donc qu'il perdît une partie de sa journée, ou qu'il changeât d'occupation ; dès-lors la division du travail ne serait plus aussi grande.

Par cette raison, elle ne peut être poussée à son dernier terme que lorsque les produits sont susceptibles d'être transportés au loin, pour étendre le nombre de leurs consommateurs, ou lorsqu'elle s'exerce dans une grande ville qui offre par elle-même une grande consommation. C'est par la même raison que plusieurs sortes de travaux, qui doivent être consommés en même temps que produits, sont exécutés par une même main dans les lieux où la population est bornée.

Dans une petite ville, dans un village, c'est souvent le même homme qui fait l'office de barbier, de chirurgien, de médecin et d'apothicaire ; tandis que dans une grande ville, non-seulement ces occupations sont exercées par des mains différentes, mais l'une d'entre elles, celle de chirurgien, par exemple, se subdivise en plusieurs autres, et c'est là seulement qu'on trouve des dentistes, des oculistes, des accoucheurs, lesquels, n'exerçant qu'une seule partie d'un art étendu, y deviennent beaucoup plus habiles qu'ils ne pourraient jamais l'être sans cette circonstance.

Il en est de même relativement à l'industrie commerciale. Voyez un épicier de village : la consommation bornée de ses denrées l'oblige à être en même temps marchand de merceries, marchand de papier, cabaretier, que sais-je ? écrivain public peut-être, tandis que, dans les grandes villes, la vente, non pas des seules épiceries, mais même d'une seule drogue, suffit pour faire un commerce. A Amsterdam, à Londres, à Paris, il y a des boutiques où l'on ne vend autre chose que du thé, ou des huiles, ou des vinaigres ; aussi chacune de ces boutiques est bien mieux assortie dans ces diverses denrées que les boutiques où l'on vend en même temps un grand nombre d'objets différens.

C'est ainsi que, dans un pays riche et populeux, le voiturier, le marchand en gros, en demi-gros, en détail, exercent différentes parties de l'industrie commerciale, et qu'ils y portent et plus de perfection et plus d'économie. Plus d'économie, bien qu'ils gagnent tous ; et si les explications qui en ont été données ne suffisaient pas, l'expérience nous fournirait son témoignage irrécusable ; car c'est dans les lieux où toutes les branches de l'industrie commerciale sont divisées entre plus de mains que le consommateur achète à meilleur marché. à qualités égales, on n'obtient pas dans un village une denrée venant de la même distance à un aussi bon prix que dans une grande ville ou dans une foire.

Le peu de consommation des bourgs et villages, non-seulement oblige les marchands à y cumuler plusieurs occupations, mais elle est même insuffisante pour que la vente de certaines denrées y soit constamment ouverte. Il y en a qu'on n'y trouve que les jours de marché ou de foire ; il s'en achète ce jour-là seul tout ce qui s'en consomme dans la semaine, ou même dans l'année. Les autres jours le marchand va faire ailleurs son commerce, ou bien s'occupe d'autre chose. Dans un pays très-riche et très-populeux, les consommations sont assez fortes pour que le débit d'un genre de marchandise occupe une profession pendant tous les jours de la semaine.

Les foires et les marchés appartiennent à un état encore peu avancé de prospérité publique, de même que le commerce par caravanes appartient à un état encore peu avancé des relations commerciales ; mais ce genre de relations vaut encore mieux que rien.

De ce qu'il faut nécessairement une consommation considérable pour que la séparation des occupations soit poussée à son dernier terme, il résulte qu'elle ne peut pas s'introduire dans la fabrique des produits qui, par leur haut prix, ne sont qu'à la portée d'un petit nombre d'acheteurs. Elle se réduit à peu de chose dans la bijouterie, surtout dans la bijouterie recherchée ; et, comme nous avons vu qu'elle est une des causes de la découverte et de l'application des procédés ingénieux, il arrive que c'est précisément dans les productions d'un travail exquis que de tels procédés se rencontrent plus rarement. En visitant l'atelier d'un lapidaire, on sera étonné de la richesse des matériaux, de la patience et de l'adresse du metteur en œuvre ; mais c'est dans les ateliers où se préparent en grand les choses d'un usage commun, qu'on sera frappé d'une méthode heureusement imaginée pour expédier la fabrication et la rendre plus parfaite.

En voyant un collier fait en cheveux, on se représentera tant bien que mal le métier sur lequel il a été natté, la patience de l'ouvrier, les petites pinces dont il s'est aidé, mais en voyant un lacet de fil, il est peu de personnes qui se doutent qu'il ait été fabriqué par un cheval aveugle ou par un courant d'eau ; ce qui est pourtant vrai.

L'industrie agricole est celle des trois qui admet le mois de division dans les travaux. Un grand nombre de cultivateurs ne sauraient se rassembler dans un même lieu pour concourir tous ensemble à la fabrication d'un même produit. La terre qu'ils sollicitent est étendue sur tout le globe, et les force à se tenir à de grandes distances les uns des autres. De plus, l'agriculture n'admet pas la continuité d'une même opération. Un même homme ne saurait labourer toute l'année tandis qu'un autre récolterait constamment.

Enfin, il est rare qu'on puisse s'adonner à une même culture dans toute l'étendue de son terrain, et la continuer pendant plusieurs années de suite ; la terre ne la supporterait pas ; et si la culture était uniforme sur toute une propriété, les façons à donner aux terres et les récoltes tomberaient aux mêmes époques, tandis que dans d'autres instants les ouvriers resteraient oisifs.

La nature des travaux et des produits de la campagne veut encore qu'il convienne au cultivateur de produire lui-même les légumes, les fruits, les bestiaux, et même une partie des instruments et des constructions qui servent à la consommation de sa maison, quoique ces productions soient d'ailleurs l'objet des travaux exclusifs de plusieurs professions.

Dans les genres d'industrie qui s'exercent en ateliers, et où le même entrepreneur donne toutes les façons à un produit, il ne peut, sans de gros capitaux, subdiviser beaucoup ses opérations. Cette subdivision réclame de plus fortes avances en salaires, en matières premières, en outils. Si dix-huit ouvriers ne faisaient que vingt épingles chacun, c'est-à-dire, trois cent soixante épingles à la fois, pesant à peine une once, une once de cuivre successivement renouvelée suffirait pour les occuper. Mais si, au moyen de la séparation des occupations, les dix-huit ouvriers font par jour, ainsi qu'on vient de le voir, quatre-vingt-six mille quatre cents épingles, la matière première nécessaire pour occuper ces dix-huit ouvriers devra être constamment du poids de deux cent quarante onces ; elle exigera par conséquent une avance plus considérable. Et si l'on considère qu'il se passe peut-être deux ou trois mois, depuis le moment où le manufacturier achète le cuivre jusqu'à celui où il rentre dans cette avance par la vente des épingles, on sentira qu'il est obligé d'avoir, pour fournir constamment de l'occupation à ses ouvriers, soixante ou quatre-vingts fois deux cent quarante onces de cuivre en fabrication à différents degrés, et que la portion de son capital, occupée par cette matière première seulement, doit être égale par conséquent à la valeur de douze cents livres pesant de métal de cuivre. Enfin, la séparation des occupations ne peut avoir lieu qu'au moyen de plusieurs instruments et machines qui sont eux-mêmes une partie importante du capital. Aussi voit-on fréquemment, dans les pays pauvres, le même travailleur commencer et achever toutes les opérations qu'exige un même produit, faute d'un capital suffisant pour bien séparer les occupations.

Mais il ne faut pas s'imaginer que la séparation des travaux ne puisse avoir lieu qu'au moyen des capitaux d'un seul entrepreneur et dans l'enceinte d'un même établissement. Toutes les façons d'une paire de bottes ne sont pas données par le bottier seulement, mais aussi par le nourrisseur de bestiaux, par le mégissier, par le corroyeur, par tous ceux qui fournissent de près ou de loin quelque matière ou quelque outil propres à la fabrication des bottes ; et, quoiqu'il y ait une assez grande subdivision de travail dans la confection de ce produit, la plupart de ces producteurs y concourent avec d'assez petits capitaux.

Après avoir examiné les avantages et les bornes de la subdivision des différents travaux de l'industrie, si nous voulons avoir une vue complète du sujet, il convient d'observer les inconvénients qu'elle traîne à sa suite.

Un homme qui ne fait, pendant toute sa vie, qu'une même opération, parvient à coup sûr à l'exécuter mieux et plus promptement qu'un autre homme ; mais en même temps il devient moins capable de toute autre occupation, soit physique, soit morale ; ses autres facultés s'éteignent, et il en résulte une dégénération dans l'homme considéré individuellement. C'est un triste témoignage à se rendre, que de n'avoir jamais fait que la dix-huitième partie d'une épingle ; et qu'on ne s'imagine pas que ce soit uniquement l'ouvrier qui toute sa vie conduit une lime ou un marteau, qui dégénère ainsi de la dignité de sa nature ; c'est encore l'homme qui par état exerce les facultés les plus déliées de son esprit. C'est bien par une suite de la séparation des occupations que près des tribunaux il y a des procureurs dont l'unique occupation est de représenter les plaideurs, et de suivre pour eux tous les détails de la procédure. On ne refuse pas en général à ces hommes de loi l'adresse ni l'esprit de ressources dans les choses qui tiennent à leur métier ; cependant il est tel procureur, même parmi les plus habiles, qui ignore les plus simples procédés des arts dont il fait usage à tout moment : s'il faut qu'il raccommode le moindre de ses meubles, il ne saura par où s'y prendre ; il lui sera impossible même d'enfoncer un clou sans faire sourire le plus médiocre apprenti : et qu'on le mette dans une situation plus importante ; qu'il s'agisse de sauver la vie d'un ami qui se noie, de préserver sa ville des embûches de l'ennemi, il sera bien autrement embarrassé ; tandis qu'un paysan grossier, l'habitant d'un pays demi-sauvage, se tirera avec honneur d'une semblable difficulté.

Dans la classe des ouvriers, cette incapacité pour plus d'un emploi rend plus dure, plus fastidieuse et moins lucrative la condition des travailleurs. Ils ont moins de facilité pour réclamer une part équitable dans la valeur totale du produit. L'ouvrier qui porte dans ses bras tout un métier, peut aller partout exercer son industrie, et trouver des moyens de subsister ; l'autre n'est qu'un accessoire qui, séparé de ses confrères, n'a plus ni capacité ni indépendance, et qui se trouve forcé d'accepter la loi qu'on juge à propos de lui imposer.

En résultat, on peut dire que la séparation des travaux est un habile emploi des forces de l'homme ; qu'elle accroît en conséquence les produits de la société, c'est-à-dire, sa puissance et ses jouissances, mais qu'elle ôte quelque chose à la capacité de chaque homme pris individuellement.

Cet inconvénient, au reste, est amplement compensé par les facilités qu'une civilisation plus avancée procure à tous les hommes pour perfectionner leur intelligence et leurs qualités morales. L'instruction de la première enfance mise à la portée des familles d'ouvriers, l'instruction qu'ils peuvent puiser dans des livres peu chers, et cette masse de lumières qui circule perpétuellement au milieu d'une nation civilisée et industrieuse, ne permettent pas qu'aucun de ses membres soit abruti seulement par la nature de son travail. Un ouvrier d'ailleurs n'est pas constamment occupé de sa profession ; il passe nécessairement une partie de ses instants à ses repas et ses jours de repos au sein de sa famille. S'il se livre à des vices abrutissants, c'est plutôt aux institutions sociales qu'à la nature de son travail, qu'il faut les attribuer.