Différences entre les versions de « Walter Lippmann:La Cité libre - Chapitre 9 - la grande révolution et la montée de la "grande association" »

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On comprend donc facilement pourquoi la plupart des hommes ont voulu échapper à la dictature cruelle du marché ouvert. Je crois que le mouvement collectiviste dans ses nombreuses manifestations n'est précisément pas autre chose qu'une révolte contre l'économie marchande. Il se manifeste parfois sous la forme d'une demande de « protection ». Le mot est bien choisi. Si un formidable mouvement protectionniste a entraîné tous les grands pays depuis soixante-dix ans, c'est parce que les hommes sont convaincus que le libre-échange mondial provoque une dislocation intolérablement rapide et violente des intérêts établis du capital et du travail. C'est pour se protéger contre le marché ouvert qu'on fait des tarifs douaniers, des lois contre l'immigration, des lois fixant les heures et les salaires minima dans certaines régions, qu'on établit des tarifs syndicaux, des règlements sur l'apprentissage, des régimes de licences pour certains métiers. Le désir de protection peut provoquer une demande d'interdiction au capital étranger de l'accès de certaines industries et des territoires coloniaux. Il peut également apparaître sous la forme d'une tentative de contrôle des investissements, exercé par des banquiers qui empêchent les capitaux nouveaux de concurrencer trop facilement les capitaux installés. Il peut prendre la forme de toute espèce de pools, trusts, accords de restriction, monopoles de brevets, et autres procédés destinés à protéger les industries contre la concurrence qu'elles se font entre elles et que pourraient leur faire des entreprises nouvelles.
On comprend donc facilement pourquoi la plupart des hommes ont voulu échapper à la dictature cruelle du marché ouvert. Je crois que le mouvement collectiviste dans ses nombreuses manifestations n'est précisément pas autre chose qu'une révolte contre l'économie marchande. Il se manifeste parfois sous la forme d'une demande de « protection ». Le mot est bien choisi. Si un formidable mouvement protectionniste a entraîné tous les grands pays depuis soixante-dix ans, c'est parce que les hommes sont convaincus que le libre-échange mondial provoque une dislocation intolérablement rapide et violente des intérêts établis du capital et du travail. C'est pour se protéger contre le marché ouvert qu'on fait des tarifs douaniers, des lois contre l'immigration, des lois fixant les heures et les salaires minima dans certaines régions, qu'on établit des tarifs syndicaux, des règlements sur l'apprentissage, des régimes de licences pour certains métiers. Le désir de protection peut provoquer une demande d'interdiction au capital étranger de l'accès de certaines industries et des territoires coloniaux. Il peut également apparaître sous la forme d'une tentative de contrôle des investissements, exercé par des banquiers qui empêchent les capitaux nouveaux de concurrencer trop facilement les capitaux installés. Il peut prendre la forme de toute espèce de pools, trusts, accords de restriction, monopoles de brevets, et autres procédés destinés à protéger les industries contre la concurrence qu'elles se font entre elles et que pourraient leur faire des entreprises nouvelles.
Mais les hommes cherchent également par un grand nombre de moyens à se rendre maîtres du marché. Et là, leurs mobiles sont si mêlés qu'on ne saurait dire où le désir de protéger les intérêts établis finit et où celui d'exploiter et d'accaparer commence. Il y a un mouvement d'agression qui progresse côte à côte avec le mouvement protectionniste et le tient étroitement embrassé. Il emploie lui aussi des méthodes collectivistes. L'agression peut être effectuée par un monopole industriel qui retient des marchandises jusqu'à ce qu'elles atteignent un prix plus élevé que celui qu'offrirait le marché libre. C'est ainsi que les industriels organisent la restriction des ventes et que les syndicats imposent leur monopole d'embauche. L'agression a pour but d'obtenir un prix supérieur en restreignant de concert la production, en accaparant les matières premières rares et nécessaires, en exploitant des droits exclusifs, en détenant des brevets, simplement en accumulant de la puissance économique par la création de sociétés affiliées ou la conclusion d'accords tacites dictés par une communauté d'intérêts personnels ou financiers.
Ces mesures de protection et d'agression sont ce que j'ai appelé dans un chapitre précédent le collectivisme progressif. Leur caractéristique commune est que ceux qui y participent ne laissent pas la division du travail se régler sur un marché libre. Leur effet final est de rendre l'économie de moins en moins souple, de moins en moins productive, et de soumettre l'ordre social aux conflits de plus en plus violents des groupes d'intérêts. Dans les pays riches, où le marché est vaste et l'économie productive, on peut régler les conflits par voie de compromis. Dans les autres c'est impossible, et le collectivisme progressif se transforme en collectivisme total. Les hommes commencent par chercher à se défendre contre le marché ou à le dominer. Ils finissent par rejeter en bloc la conception d'une économie dans laquelle le marché règle la division du travail. Ils la remplacent par la conception d'une économie réglée par une autorité intelligente.
==La différence essentielle entre libéralisme et collectivisme==
Nous pouvons voir maintenant que collectivisme et libéralisme sont deux moyens différents de résoudre les problèmes humains et techniques essentiels posés par la division du travail.


== Notes et références ==  
== Notes et références ==  
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